mardi 8 novembre 2011

But de Karim / Solo de Nick

Bizarre. Extraordinaire comme ces interactions entre des événements, sans aucun rapport a priori, peuvent être des charnières dans une vie. Des charnières centrales. L'existence, un mécanisme, les procès qui s'enchaînent et forment le temps, un système. La coordination de cette miraculeuse chorégraphie est parfois franchement déroutante de logique. Mais oui ! "Eurêka" disait Archimède. Pouvait-il savoir qu'il serait plus de deux mille ans avant notre époque, le premier théoricien du football ? Le centre de gravité, De l'équilibre des figures planes. Trouver le sien, tenir sur ses deux pieds, le droit, le gauche. Dribbler des brésiliens au niveau de la ligne médiane, alors qu'on reconstruit. La classe.

De l'autre côté du monde, ça a l'air différent. Faux. Intro, couplet, pont, pré-refrain, refrain, reprise de l'intro, couplet diminué par deux, pont, pré-refrain, refrain, solo, pré-refrain, refrain, un café, l'addition. Merci. Comme des phases de jeux pensées, répétées à l'entraînement, tout est logique. Chaque joueur est bien placé dans son camp, dans ses lignes. On prend toute la largeur du terrain, il y a du souffle. De l'espoir pour les cons. Batterie et basse jouent ensemble comme deux défenseurs axiaux soudés à la vie à la mort, tacle, dégagement, c'est propre. Comme un arrière droit balançant de l'extérieur une passe lointaine pour l'offensif gauche. Courses croisées des guitares, harmonies célestes. Thin Lizzy, disait le centre-avant de l'équipe Strokes, Julian Casablancas. Oui, mais en mieux quand même. Plutôt style FC Barcelone.

Jusque là tout va bien. Seulement ce ne sont que des considérations de surface. Maintenant, passons au fond de jeu. "Don't go that way, I'll wait for you". Ne fais pas cet appel, va de l'autre côté. Je serai là. Des valeurs de solidarité et d'amitié. Mielleux mais bordel, c'est pas le principe de la vie ? Akhenaton, sur "L'Enfer", titre le plus revêche de "L'école du micro d'argent", le disait, soupirant d'un "Pfff" qui en dit long sur le niveau d'intensité de la violence de ce putain de monde : "Un bon délire, avec son équipe ça fait frémir".

Voilà ce qui manquait à l'Equipe de France, aux Strokes. Du soutien. Oxmo disait "Moi chuis ma propre poutre, me soutiens seul, rien à foutre". C'est pas donné à tout le monde mec. Et chuis sûr que t'exagérais, t'étais jeune t'avais rien à perdre en disant ça.

Puis la cruauté. "So long, my friend & adversary".

M'Vila remet sur le côté droit pour Ménez. Nick Valensi appuie sur la pédale et quelques sifflements sont émis du fait du volume de l'ampli. Do# mineur, Ré# mineur. Ménez qui avance lentement, son cerveau fonctionne à mille à l'heure, il envisage ses options. Il pense à Rome, à l'assassinat de Jules César. Il veut crucifier Julio Cesar, à son tour être Empereur. Et là ça devient cosmique. C'est Debussy. C'est un Si, c'est un Mi mineur, Albert s'envole vers les cieux, il y touche une étoile...Cascade, redescente foudroyante, fulminante, fulgurante vers la terre, en Do# puis Re#, la mélodie est émouvante. Ménez passe entre deux défenseurs brésiliens, s'approche de la surface de réparation, atteint le niveau des cages, centre.

Benzema marque le but.

L'Egypte est libre.

Les Strokes sont de retour.

Y a des jours, comme ça...